On pourrait penser que nos données les plus sensibles sont déjà entre les mains des géants du numérique (Google, Meta, Amazon, etc.) ou des États, et que le mal est fait.
Pourtant, une énorme quantité d’informations personnelles reste encore sous notre contrôle direct – et elles sont tout aussi convoitées, voire plus, par les cybercriminels, les publicitaires ou d'autres acteurs malveillants.

Pourquoi vos données privées sont encore en danger, même si les GAFAM en ont déjà beaucoup ?

Si nous n’adoptons pas de bonnes habitudes cyber, ces données privées peuvent être exposées bien plus facilement qu’on ne le croit.

Deux réalités qui se cumulent (et aggravent les risques)

Les données déjà "perdues" (mais pas forcément exploitées à 100%).
Les grands groupes (GAFAM, banques, assurances, États) stockent déjà massivement nos données :

  • Localisation (Google Maps, Apple, opérateurs télécoms)
  • Habitudes de consommation (Amazon, Meta, TikTok)
  • Données biométriques (reconnaissance faciale, empreintes digitales)
  • Historique médical (applications santé, assurances)
  • Conversations privées (Messenger, WhatsApp, emails)
    Mais ces données sont souvent anonymisées ou agrégées étant principalement utilisées pour le ciblage publicitaire, pas pour une attaque personnelle. Elles sont (en théorie) protégées par des régulations (RGPD en Europe, lois locales). Un piratage massif (comme ceux de Facebook, LinkedIn, Free ou Uber) ne signifie pas que vos données sont activement utilisées contre vous… ou pas encore.

👉 Le vrai danger vient du fait que ces données fuitent, associées en combinaison avec d’autres informations encore privées.

Les données toujours en votre possession (et bien plus vulnérables).
Malgré tout, une énorme partie de votre vie numérique reste sous votre contrôle direct – et c’est cette partie là qui est, si vous ne faites pas attention, la plus facile à voler .

  • Les mots de passe, stockés sur des navigateurs, des carnets, des fichiers texte, s'ils sont compromis, donnent accès à tous vos comptes (emails, banques, réseaux sociaux).
  • Les photos et vidéos privées, inondent les téléphones, les services cloud, les supports amovibles, mais entre de mauvaises mains, elles peuvent être utilisées pour vous faire chanter, usurper votre identité numérique ou réelle, détournées, à des fins peu avouables.
  • Votre historique de navigation que votre navigateur alimente scrupuleusement à chaque clic, permet d'établir un profilage extrême, exploitable pour mener des campagnes de phishing ultraciblé et de l’ingénierie sociale.
  • Vos documents administratifs, documents d'identité, contrats, fiches de paie, factures, conservés en cloud ou localement (disque dur ou autre) ou encore transmis dans le cadre de contrats divers, ils fournissent les éléments complémentaires à l'usurpation d'identité et aux fraudes bancaires (ouverture de comptes sous votre identité, prêts multiples).
  • Vos conversations privées (WhatsApp, Telegram, Signal) sont (pour l'instant) seulement accessibles et lisibles par les protagonistes de ces discussions, mais entre de mauvaises mains peuvent également gravement nuire à votre identité (chantage, diffusion publique, exploitation d'informations confidentielles).
  • Vos données de santé (sécurité sociale, mutuelle, apps fitness) autres que celles déjà détenues par des services tiers, sont également susceptibles d'être détournées à des fins malveillantes (chantage, discrimination et ingénierie sociale).

    📰Alerte, une cyberattaque touche le cœur du système de santé régional

  • Vos accès à des comptes professionnels (Slack, Trello, boîtes mail pro) qui participent aux opérations d'espionnage industriel et autres fuites de données d’entreprise.
    Ces données sont beaucoup plus faciles à voler que celles des GAFAM, car elles sont :
  • Moins protégées (pas d’équipes de cybersécurité dédiées comme chez Google).
  • Souvent stockées en clair (fichiers non chiffrés, mots de passe réutilisés).
  • Accessibles via des attaques simples (phishing, malware, Wi-Fi public non sécurisé).

    Pourquoi ces données sont elles aussi convoitées ?

Au delà de leur sensibilité, ces données sont généralement beaucoup plus accessibles :

  • Pirater votre boîte mail via un phishing est bien plus simple que de hacker les serveurs de Google.
  • Vos appareils (téléphone, PC) sont souvent mal sécurisés (pas de mise à jour, mots de passe faibles). C’est plus rentable :
  • Vos identifiants bancaires donnent immédiatement un accès direct et complet à votre compte.
  • Vos photos intimes peuvent faire immédiatement l'objet d'un chantage (sextorsion).
  • Vos emails pro ouvrent la voie à l'espionnage industriel, à des accès aux données d'entreprise. C’est moins risqué pour les attaquants :
  • Pirater un particulier ne déclenche pas d’enquête internationale (contrairement à une attaque contre Apple).
  • Les victimes ne portent pas toujours plainte (honte, méconnaissance).
  • Les poursuites judiciaires sont rendues complexes par l'absence de frontières en ligne, mais pas dans le cadre légal.

Comment se protéger ?

Même si les GAFAM ont déjà beaucoup de vos données, vous pouvez encore limiter les dégâts en protégeant ce qui reste sous votre contrôle :

    1. Sécurisez vos accès (la base !) Utilisez un gestionnaire de mots de passe (Bitwarden, 1Password, ...) → Plus de "123456" ou de réutilisation. **Activez la 2FA par clé physique (YubiKey) ou app authentificateur (Google Authenticator, Authy, ...) → Évitez le 2FA par SMS (trop vulnérable). Changez les mots de passe par défaut (routeurs, caméras connectées, etc.).
    1. Protégez vos appareils (où vos données privées sont stockées)
      Mettez à jour vos systèmes (Windows, macOS, Android, iOS) → Les failles connues sont souvent exploitées. Chiffrez vos disques (BitLocker, FileVault) → Si votre PC est volé, vos données restent illisibles. Évitez les réseaux Wi-Fi publics non sécurisés (ou utilisez un VPN).
    1. Limitez l’exposition de vos données sensibles
      Ne stockez pas de documents administratifs dans votre boîte mail (utilisez un cloud chiffré comme Proton Drive ou Cryptomator). Supprimez les anciens comptes inutilisés (via JustDeleteMe). Vérifiez les permissions des apps (pourquoi un jeu a-t-il besoin d’accéder à vos contacts ?).
    1. Soyez paranoïaque avec les tentatives de phishing
      Ne cliquez jamais sur un lien suspect (même si l’email semble venir de votre banque). Vérifiez toujours l’URL (un faux site peut ressembler à paypa1.com au lieu de paypal.com). Ne téléchargez pas de pièces jointes inattendues (même d’un contact connu → leur compte peut être piraté).
    1. Anticipez les fuites (car elles arriveront)
      Utilisez Have I Been Pwned pour vérifier si vos données ont fuité. Gelez votre crédit (aux États-Unis) ou activez des alertes fraude (en Europe) pour éviter les usurpations. Préparez un "kit de crise" (copies de vos pièces d’identité, liste des comptes à désactiver en cas de piratage).
  • Réduire votre surface d’attaque, le véritable enjeu
    Les GAFAM et les États ont déjà une partie de vos données, mais ils ne peuvent pas (encore) tout faire avec (régulations, anonymisation). **Ce sont vos données restantes (mots de passe, emails, photos, accès bancaires) qui permettent aux cybercriminels de vous cibler personnellement.

  • En adoptant de bonnes habitudes cyber, vous rendez leur travail beaucoup plus difficile – et vous limitez les risques de :

  • Piratage de comptes (banque, réseaux sociaux).

  • Usurpation d’identité (prêts, fraudes).

  • Chantage (sextorsion, fuites de données sensibles).

  • Espionnage (pro ou personnel).

  • "Ils en savent déjà beaucoup, mais pas tout."
    Oui, vos données sont déjà partiellement entre les mains de grands groupes – mais ce n’est pas une raison pour baisser la garde. Bien au contraire.
    Ce qui reste privé est encore plus précieux (car directement exploitable). Les cybercriminels ciblent d’abord les maillons faibles (vous, pas Google). De petites actions (2FA, gestionnaire de mots de passe, méfiance face aux liens) font une énorme différence.

La cybersécurité, c’est comme une ceinture de sécurité :
Ça ne vous protège pas à 100%, mais ça réduit considérablement les risques. Et quand l’accident arrive, ça peut vous sauver.

Commencez par 1 ou 2 actions dès aujourd’hui (ex : installer un gestionnaire de mots de passe + activer la 2FA). C’est déjà un énorme pas.

📷 Crédit photo : geralt | pixabay.com